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Jurisprudence Novembre 2015  -  Maître Catherine DUDAR  -  Tél : 04 72 84 02 20

 Jurisprudence

Obligation de sécurité pesant sur les salariés

Cass. Soc, 7 octobre 2015, n°14-12403

Un salarié, responsable de site, est tenu de respecter et de faire respecter les prescriptions en matière d’hygiène et de sécurité. A défaut, il s’expose à un licenciement pour faute grave.

Dans cette affaire, un responsable de site avait donné l’ordre de procéder au démontage de rayonnages en les escaladant sans aucune protection pour assurer la sécurité des salariés.  Il a été licencié pour faute grave.

La Cour d’appel avait jugé que le salarié n’avait fait que respecter une injonction de son supérieur hiérarchique mais la Cour de Cassation rappelle dans cet arrêt qu’en vertu des dispositions de l’article L 4122-1, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celle des autres personnes concernées.

Qu’il était donc tenu de faire appliquer les prescriptions en matière d’hygiène et de sécurité.

Le responsable de site avait donc commis un manquement rendant impossible son maintien dans l’entreprise en ne respectant pas ses obligations découlant de son contrat de travail.

Il s’agit d’une jurisprudence constante :

Cass. soc, 6 juin 2007, n°05-45984

Cass. soc, 30 septembre 2005, n°04-40625.

 

Rupture de la période d’essai

Cass. Soc, 16 septembre 2015, n°14-16713
L’employeur peut mettre fin à la période d’essai d’un salarié mais le préavis légal ou conventionnel doit être exécuté. Si ce dernier s’étend au-delà du terme de la période d’essai initialement prévu, il convient que l’employeur dispense le salarié de l’exécution de ce préavis et le lui rémunère.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation a rappelé que si l’employeur veut rompre tardivement la période d’essai de son salarié, en écourtant le délai de prévenance, il doit indemniser le salarié du solde du préavis ne pouvant pas être exécuté.

En l’espèce, le 13 octobre 2010 un employeur a mis fin à une période d’essai dont le terme était prévu au 14 novembre 2010. Le délai de prévenance était d’un mois, auquel s’ajoutait le délai de préavis prévu par la convention collective d’une durée de 7 semaines et devant ainsi s’accomplir jusqu’au 2 décembre 2010, soit après le terme initial de la période d’essai.

Pour éviter la requalification de la rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse étant donné le risque de dépassement, l’employeur avait dispensé le salarié du préavis et le lui avait rémunéré.

La Cour d’appel avait jugé que la rupture devait être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse puisqu’elle était intervenue le 2 décembre 2010 soit après le terme de la période d’essai.

Cependant, la Cour de Cassation donne raison à l’employeur, en s’assurant que ce dernier avait bien mis fin à l’essai avant son terme et qu’il avait rémunéré le salarié au titre du solde de sa période de préavis.

 

Licenciement pour motif personnel

Cass. soc, 16 sept 2015, n°14-10325

L’absence d’entretien préalable n’a pas pour effet de priver le licenciement de son caractère réel et sérieux.

Dans cette affaire, un salarié s’est vu notifier une mutation disciplinaire qu’il a refusée prétextant qu’elle modifiait son contrat de travail. Suite à ce refus, l’employeur ne le convoque pas à un nouvel entretien préalable mais lui notifie directement son licenciement.

Selon le salarié, l’employeur avait commis une faute rendant ainsi son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. La Cour de Cassation rappelle que l’absence d’entretien préalable n’a pas pour effet de priver la cause du licenciement de son caractère réel et sérieux mais qu’il s’agit d’une simple irrégularité de procédure justifiant le paiement d’une indemnité maximale d’un mois de salaire ou d’une indemnité fixée en fonction du préjudice subi.

En effet, le licenciement est toujours motivé par la faute à l’origine de la procédure disciplinaire et l’obligation d’entretien préalable a cessé lorsque l’employeur a remis au salarié la lettre de convocation au premier entretien faisant référence à une éventuelle sanction pouvant aller jusqu’au licenciement.

La loi Macron du 6 août 2015 a étendu cette faculté de dérogation au document unilatéral établi par l’employeur (licenciements collectifs pour motif économique de 2 à 9 salariés) en permettant de réduire le périmètre d’application des critères d’ordre sous réserve que le périmètre ne soit pas inférieur à une « zone d’emploi ».

Un prochain décret est attendu pour venir préciser la notion de « zone d’emploi ».

 

Critères d’ordre : périmètre d’appréciation

Cass. Soc, 14 octobre 2015, n°14-14339

Selon l’article L. 1233-5 du code du travail, lors d’un licenciement pour motif économique, l’employeur doit établir des critères d’ordre des licenciements. Ces critères s’appliquent au niveau de l’entreprise. Toutefois, un accord collectif peut prévoir un périmètre inférieur à celle-ci.

Dans cette affaire, une société a mis en place un plan de sauvegarde de l’emploi.

Les critères d’ordre ont été fixés par un accord collectif d’entreprise signé par la société et des organisations syndicales puis approuvé par le comité d’entreprise ; l’accord prévoyait que ces critères étaient mis en place non sur l’entreprise mais sur un périmètre géographique plus restreint « de l’agence, du bureau ou du site technique, siège social, plate-forme technique ».

Une salariée licenciée de cette entreprise sollicite des dommages et intérêts pour réparation de son préjudice, estimant que le périmètre géographique retenu par l’ordre des licenciements était trop restreint et que les critères d’ordre de licenciement devaient s’appliquer à tous les salariés de l’entreprise.

Alors que la Cour administrative d’appel de Versailles avait jugé qu’un accord collectif était nécessaire, la Cour de cassation décide quant à elle qu’un accord collectif conclu au niveau de l’entreprise peut prévoir un périmètre inférieur à celui de l’entreprise pour l’application des critères d’ordre de licenciement.

Elle a ainsi validé les termes de l’accord d’entreprise et le licenciement intervenu.

Cette possibilité de déroger au secteur géographique de l’entreprise a été explicitement prévue par la loi de sécurisation de l’emploi (article L. 1233-24-2, 2° du code du travail).

 

Retraite supplémentaire : cotisation exonérée/condition

Cass. 2e civ, 17 sept 2015, n°14-20264

Dans cette affaire, un accord d’entreprise prévoyait un régime de retraite supplémentaire à prestations et cotisations définies pour l’ensemble des cadres.  La contribution patronale n’était pas identique pour tous les cadres puisque ces derniers étaient répartis en quatre groupes distincts, en fonction de leur ancienneté et de leur âge ; des taux différents étaient attribués à chacun de ces quatre groupes.

L’URSSAF en a déduit que cette contribution, ne répondant pas aux conditions posées à l’article L.242-1 al6 du code de la sécurité sociale (à savoir un taux uniforme pour tous les salariés d’une même catégorie) ne pouvait pas être exonérée de cotisations.

La Cour de Cassation valide la position de l’URSSAF en décidant que dès lors que le régime de retraite supplémentaire couvre l’ensemble des cadres de l’entreprise, la déductibilité de la contribution de l’employeur est subordonnée à la fixation de celle-ci à un taux uniforme pour tous les salariés couverts. Par conséquent, la Cour de Cassation a jugé que le redressement opéré auprès de cette entreprise était fondé.

 

Mandat : information de l’employeur

Cass. Soc, 30 septembre 2015, n°14-17748

Dans cette affaire, une salariée a été embauchée alors qu’elle était titulaire d’un mandat de conseiller prud’homal (mandat extérieur). Son contrat de travail en faisait la mention.

Le mandat initial de la salariée a été renouvelé lors des élections prud’homales ultérieures mais sans que son employeur n’en soit informé.

Par la suite, les parties ont décidé de signer une rupture conventionnelle et l’on adressée aux services du Direccte aux fins d’homologation mais sans solliciter l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail pourtant indispensable dans l’hypothèse de la rupture du contrat d’un salarié protégée.

En l’absence d’autorisation de l’inspecteur du travail, la salariée a sollicité la nullité de sa rupture conventionnelle, en invoquant que son employeur avait eu connaissance de son mandat initial.

La Cour de Cassation ne va pas suivre ce raisonnement et décide que la salariée aurait dû, au plus tard, « lors de la rupture conventionnelle » informer son employeur de sa réélection ou établir que ce dernier avait été avisé par d’autres voies. La Cour de Cassation juge en conséquence que dès lors que le mandat extérieur exercé par la salariée avait été renouvelé, elle aurait dû en avertir son employeur pour bénéficier du statut protecteur.